Après Klami et Alwâne, Djazia Satour revient avec un nouvel album intitulé Aswât (Des voix) qui explore, dans la veine subtile et personnelle que nous lui connaissons, l’héritage musical algérien. On reconnaît encore dans les compositions originales qu’elle propose les influences les plus actuelles, empruntées notamment à la folk indie et au groove d’une pop pétillante. L’inspiration s’infléchit cependant de façon marquée vers les genres traditionnels qui ont bercé ses premières années.
Cette résurgence des modes musicaux et des rythmes algérois n’est pas seulement perceptible dans les accents mélodiques et les vocalises, tout en touches de sensibilité. Elle s’affirme dans la présence du banjo et du mandole qui font jaillir leurs sublimes étincelles dans les accords et les transitions instrumentales. Porté par ces deux ailes virevoltantes du chaâbi et soutenu à son paroxysme par le bendir, le chant prend de l’altitude et résonne comme un rappel lancinant des origines.
Les textes évoquent sur un ton à la fois intuitif et distancié les thèmes de la dépossession, de l’exil et de l’errance (Ida, Taleb Laman, Chouf Elil), en appelant à la mémoire et à l’amour qui avivent la nostalgie des lieux désertés et des gens disparus (Souâl, Loun Liyam, Yama Tal). Ce sont autant de voix qui répercutent le tumulte du monde, dont La mélodie des vents (Neghmat Erriah) entrelace « les cris et les lamentations ». Elles ne pouvaient donc mieux s’exprimer aujourd’hui qu’en arabe, langue d’écriture de toutes les chansons.
Le retour aux sources musicales se nuance alors de ces affleurements du présent, comme si le réel s’immisçait pour une fois dans la nostalgie et le souvenir. C’est dire que, loin de céder aux tentations passéistes, ce nouvel album de Djazia va chercher dans la tradition de nouvelles opportunités d’invention.